Nord Eclair 09/03/2009

La Gangrène ou la métaphore du malaise social

Théâtre, marionnettes, vidéos, tous les supports sont bons pour assurer à la mise en scène son propos pamphlétaire.

Photo La Gangrène Delphine Delafosse - Patrick Smith
Photo Philip Bernard
L'Oiseau-mouche a accueilli mercredi dernier, la compagnie Agathe dans le vent, qui proposait sa première création : la Gangrène. Une pièce envoûtante, dérangeante voire pamphlétaire qui a séduit ta soixantaine de spectateurs.


Au XVIIIe siècle, la grogne sociale monte. Gangrené par ces mouvements, le Roi doit se soigner, et consulte pour cela ses médecins... Une intrigue apparemment simple sauf qu'ici, tout n'est que métaphore chaque organe défaillant du monarque représente une des couches d'une société malade et en plein changement. Et en disséquant ainsi leur malade royal, les deux médecins, interprétés par Delphine Delafosse et Charlotte Talpaert, procèdent à une autopsie minutieuse de la société de l'époque.

Théâtre, marionnettes, projections de vidéos, tous les supports sont bons pour assurer à la mise en scène son propos pamphlétaire. Mise en scène qui se plaît par ailleurs à semer la confusion dans l'esprit du spectateur. La lumière, qui privilégie beaucoup le clair-obscur, ainsi que l'insertion d'éléments anachroniques dans une scène du XVIIIe siècle, confèrent une atmosphère fantastique et surréaliste à la pièce. Si bien qu'on finit par se demander si les choses ont vraiment changé depuis deux cents ans.

Conflits sociaux, identité religieuse, ingérence du gouvernement, des thèmes qui font encore les gros titres de nos jours, traités ici comme des « maladies parasitaires » dont le Roi subit les affres.

« Une société qui voudrait se passer de ses monstres, c'est comme faire la cuisine sans sel », proclament les actrices, comme un appel à la raison en cette période de crise pour la politique « politicienne ». Un message d'actualité qui a su trouver un écho parmi le public. Un beau succès pour la compagnie Agathe dans le Vent, dont cette adaptation de l'oeuvre d'Elizabeth Badinter était la première création. 

• ALBAN THOBOIS (correspondant local)

Nord Eclair 12/01/2009

La marionnette de la société a la gangrène !


«La Gangrène » est un spectacle de marionnettes pour adultes et adolescents. La jeune compagnie agathe dans le vent nous attire ainsi au beau milieu du XVIII siècle où de profonds changements s'initient. Au Zem théâtre ce soir.

«La marionnette permet la distance. On rit des situations car ce n'est pas nous, c'est loin. L'intérêt ? Se poser des questions et échanger » explique Delphine Delafosse. A l'origine du projet, elle signe la conception et la réalisation de ce spectacle insolite. Ce qui se joue sur scène est librement inspire d'un extrait de «L'amour en plus, histoire de l'amour maternel du XVII au XXème siècle» d'Elisabeth Badinter.

A la fois historique, fantastique et contemporain, ce spectacle mêle avec habileté théâtre, marionnettes et films d'animation. Delphine Delafosse et Charlotte Talpaert utilisent avec talent le corps d'un mannequin à taille humaine comme castelet. C'est alors le corps de l'Etat qu'elles dissèquent afin d'en extraire et analyser les organes déficients. Delphine Delafosse précise

« L'idée scénographique choisie fait référence à l'organicisme ». Une théorie selon laquelle la structure et le fonctionnement d'une société peuvent être comparés à ceux d'un être vivant.

Et oui, le corps de l'Etat va très mal. A l'heure d'une pensée libérale naissante, des remèdes sont prescrits aim d'abolir ses faiblesses et le risque de prolifération des microbes pathogènes que sont les inactifs et les opposants.

L'objectif avoué ? Créer une matière première polyvalente et soumise qui répondrait à tous les besoins de la société, afin de

créer des sujets dociles. Une mise en lumière de changements qui trouve un bel écho en cette nouvelle année. A voir.

S MATHIEU JÉGOU, CORRESPONDANT LOCAL